Sarajevo: plaies ouvertes

Publié le par magda

Sarajevo…plaies ouvertes

 

Sans titre-5Je cherche d’habitude à éviter les grandes villes, mais Sarajevo me paraissais incontournable. La ville est sûrement superbe…lorsqu’il ne pleut pas sans interruption durant 4 jours par 15 degrés et une lumière de tombée de nuit toute la journée. Rien d’autre à faire par ce temps que de rester feutré chez soit.. enfin quand on a un chez soit !…Les pieds mouillés et le moral au plus bas, je décide qu’il est temps de s’offrir le luxe d’une auberge...  Rhhha ! Bonheur d’une douche chaude et d’un vrai lit ! J’en profite pour développer tous mes films en retard en squattant le dortoir de l’auberge de jeunesse. Je rencontre 2 jeunes français qui démarrent un tour du monde de 2 ans, un belle aventure (http://tourdumonde2010.free.fr/wordpresstdm/)Sans titre-4

Difficile d’imaginer que Sarajevo accueillit un jour les jeux olympiques : On m’avait prévenu, les stigmates de la guerre sont encore vifs. Sur de nombreux murs on voit encore les impacts de balles qui recouvrent littéralement les façades. Leyla, à Visoko, me racontait que chaque matin, des oiseaux qui avaient fait leurs nids dans les impacts du mur de son immeuble la réveillait. Jolie fable. Pour nous, jeunes européens qui grandissons avec l’idée que la paix est acquise, la guerre est une idée bien abstraite : mais les reliques de la violence humaine sont assez vives pour laisser imaginer l’horreur qu’ont dû être les quatre longues années du siège de Sarajevo. D’innombrables cimetières ponctuent la ville…C’est d’ailleurs grâce à l’aspect des tombes dans les cimetières l’on peut être rapidement informé de quelle communauté il s’agit, à l’entrée des villages.

La vieille ville de Sarajevo est le seul endroit avec Jérusalem qui compte une mosquée , une église catholique, une orthodoxe, une synagogue dans un seul kilomètre carré. Les petites rues piétonnes sont bordées de nombreux petits commerces d’objets d’artisanat. Je retrouve même les chaussures de Visoko et les flûtes de Godusa. L’ambiance trop touristique m’empêche de trouver ce que je cherche : la plus part des commerçants ne font que de la revente, et rechignent à me mettre en contact avec les artisans. bosnie 0111Sans titre-1Une petite vitrine attire mon attention : un homme courbé sur son atelier  s’affaire sur une drôle de machine. Je rentre et tente la discussion : il fabrique des moteurs, de toutes sortes. C’est assez drôle de voir cet objet, qu’on imagine d’habitude plutôt dans une grosse usine mécanisée, dans un petit atelier artisanal. Un article de journal français est fièrement affiché au mur.

 

Le temps déprimant ne s’améliorant pas, je décide de quitter la ville avec une impression d’inachevé. Je me dirige vers le village de Lukomir, dans les montagnes de Sarajevo,  réputé pour être le dernier village dont les habitants vivent réellement à la manière traditionnelle. bosnie 0119Sur la route dans les montagnes, j’ai l’impression d’être dans un décor de jeux vidéo, l’ambiance est totalement irréelle et morbide : un brouillard enveloppe la cime des pins ; j’aperçois à travers les arbres un immense bâtiment, à l’allure d’un navire échoué. Peu après, un cimetière. Pas une âme à des kilomètres à la ronde. 2L’ambiance est glauquissime, et je dois passer la nuit dans les montagnes. Cette perspective me donne une nausée d’angoisse… Je tombe sur une station de ski, presque entièrement vide. Un bar d’hôtel est ouvert, et c’est avec joie et réconfort que j’accepte le parking de l’hôtel comme dortoir. Pour une fois, la nature ne me dit rien qui vaille !

Le lendemain matin, je continue ma route vers Lukomir : le village paraît être en effet bien perdu, le chemin qui y mène est interminable, sans signe de vie pendant des kilomètres. Je finis par y parvenir : le village est perché au bord d’une falaise, tout au bout du plateau.bosnie 0012 En effet, on a l’impression d’être projeté un siècle en arrière. Seules 2 ou 3 vielles voitures rappellent qu’on est probablement au Xxème ou XXIème siècle ; Je me ballade un peu dans le village, ne sachant pas trop par ou m’y prendre pour entrer en contact avec les quelques femmes que j’aperçois. Une vieille à sa porte me cri quelque chose. Je ne sais si je dois le prendre comme un message de bienvenu ou une insulte…Quelques femmes, qui portent de pauvres vêtements traditionnels, essayent de me vendre les chaussettes qu’elles ont tricotées ; Je finis par acheter un joli paire rouge avec des motifs bleus, en essayant de convaincre la femme de me laisser la regarder travailler. bosnie 0019Mais elle s’éclipse, et je me retrouve embarrassée d’être dans la position du stupide touriste. Je juge peu approprié sortir mon appareil photo. La vieille qui me cri dessus depuis mon arrivée fini par s’approcher et me tire vers sa maison. Une pièce unique de 15 mètres carré, avec 2 petits lits, un fourneaux, un petit coffre et une énorme pile de couverture. Un cadre avec de vielles photos est posé sur le lit : un probable mari défunt, en uniforme, et 2 fils, probablement en ville… L’appareil auditif de la vielle sort de temps à autres des sons suraigus. Elle prépare un café turc, sans cesser de parler. Je souris poliment, et elle rit de mes gesticulations pour tenter de me faire comprendre.bosnie 0053 Je lui offre une petite liqueur aux plantes pour sa mauvaise toux, et la laisse déçue de ne pas acheter ses chaussettes. Je repars du village après quelques heures, un peu frustrée du manque total de communication avec les villageois.

Mais sur le chemin du retour, un famille qui travaille au champs m’arrête et m’invite à les rejoindre. Je les aide à finir le travail, quelques oignons et quelques patates à planter. Ils sont incroyablement joviaux et même s’ils ne parlent pas plus anglais qu’à Lukomir, la communication passe beaucoup mieux ; Je leur prépare un thé pour fêter la fin de la journée de travail, ils me gavent de burek (spécialité balkano-turque, sorte boudin de patte feuilletée fourré au fromage ou à la viande). Je comprends qu’ils vivent à Sarajevo et ne viennent ici que pour travailler les champs. La femme la plus âgée m’offre une paire de chaussette (je commence à être parrée !), effrayé de me voir pieds nus en sandales. J’ai vu beaucoup de femmes porter ces chaussettes traditionnelles à motifs, qui épousent parfaitement la forme des pieds. bosnie 0057

Nous nous quittons le cœur réchauffé d’une belle rencontre.

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